Le Rite Ecossais Rectifié.


Le Rite Ecossais Rectifié

SOMMAIRE :

* présentation générale ; * historique ; * informations sur la Stricte Observance Templière ; * l’esprit du Rite Ecossais.

Présentation

Le Rite Ecossais Rectifié, ou simplement « rite rectifié », ou R∴E∴R∴ dérive de la Stricte Observance Templière (voir plus bas), et, à travers elle, des loges jacobites.

Ce Rite date de 1778, il comprend:

1. Les Loges symboliques de la Maçonnerie de Saint-Jean, avec trois degrés: Apprentis, Compagnons, Maîtres.

2. Les Loges symboliques de Saint-André, formées par les Maitres Ecossais de Saint-André.

3. Les Préfectures, avec Les Ecuyers-Novices et les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte (CBCS).

Ce Rite affirme son attachement à l’esprit du christianisme, au dévouement à la patrie, au perfectionnement individuel par le travail, et à l’exercice d’une bienfaisance active et éclairée envers tous les hommes. Ce Rite est surtout pratiqué en Suisse où se trouve le Grand Chapitre Helvétique qui a institué en France un Grand Prieuré des Gaules.

Ce rite a conservé certains caractères rituéliques qui donnent aux initiations l’apparence de cérémonies de musée, notamment dans les loges qui ont conservé strictement les rituels en vigueur au XVIIIe siècle.

Deux exemples le feront comprendre :

* Le Vénérable, lors de l’ouverture des travaux, prononce les paroles suivantes: « J’invite les Maîtres et Compagnons à s’asseoir. » Et, selon le rituel, il ajoute parfois, s’il le juge à propos : « Et je le permets aux Apprentis. »

* A la fin des travaux, le Vénérable, s’il y a un banquet, formule l’invitation suivante : « Je vous invite tous à un banquet frugal et fraternel ; venez y goûter, dans une société de Frères, les charmes de l’égalité. » Il faut se replacer au XVIIIe siècle pour comprendre le sens de telles phrases. A l’époque, la hiérarchie des Maîtres, Compagnons et Apprentis remplaçait en loge, pour la durée d’un soir, celle des gentilshommes et des roturiers. La première invitation pouvait contraindre, au nom de la seconde hiérarchie, des gentilshommes à demeurer debout devant des roturiers conviés à s’asseoir. 2

Quant aux « charmes de l’égalité », c’étaient là ceux de ces aristocratiques disciples de Rousseau, revenus pour une soirée à l’état de Nature, où, comme en loge, tous les hommes étaient frères. Le rituel du R∴E∴R∴ abonde en prescriptions sur le port en loge du chapeau ou de l’épée, qui, par respect pour un passé vénéré, ont été scrupuleusement conservées. Qu’on regarde les estampes admirables de J.-Ph. Le Bas, si fidèles qu’elles nous renseignent avec la même précision que si la photographie avait alors existé. Si les personnages ne portaient pas perruques, elles représenteraient presque exactement ce qui se passe aujourd’hui encore, autour du tapis encadré de hauts chandeliers, dans certaines loges du R∴E∴R∴. Celui qui a pris part à certaines de ces cérémonies éprouve l’impression d’un voyage dans le temps.

Les structures de ce Rite se ressentent de son histoire extrêmement complexe. Ses trois grades « bleus » o Apprenti o Compagnon o Maître Un grade intermédiaire : * Maître écossais de Saint-André ; Deux distinctions o Ecuyer novice; o Chevalier bienfaisant de la Cité sainte (C∴B∴C∴S∴).

Le Rite est essentiellement chrétien. Le serment maçonnique prêté exclusivement sur l’Evangile de saint Jean, comporte un engagement de fidélité « à la sainte religion chrétienne », et c’est son nom de baptême, non son « prénom », qui est demandé au candidat en même temps que son nom. En même temps, la « Règle maçonnique » rédigée en 1782 par J.-B. Willermoz, souligne ce caractère en ces termes : « Prosterne-toi devant le Verbe incarné, et bénis la Providence qui t’a fait naître parmi les chrétiens. Professe en tous lieux la divine religion de (sic) Christ, et ne rougis jamais de lui appartenir. L’Evangile est la base de nos obligations ; si tu n’y croyais pas, tu cesserais d’être maçon. »

Ce caractère chrétien s’accentue à chaque nouveau grade, et distinction. Le rituel de C∴B∴C∴S∴ comporte une agape rappelant la Cène, ainsi que la récitation du Pater. Traditionnellement, ce caractère chrétien a eu pour conséquence, assurément logique, l’exclusion des membres d’autres religions, par exemple les israélites, exclusion sans aucun caractère raciste, mais pour l’unique motif des termes du serment. La plupart des Israélites, surtout ceux attachés à leur religion, n’avaient pas, jusqu’à une date récente, disconvenu de ce que le R∴E∴R∴ n’était pas fait pour eux. Mais dans certaines loges, des tendances nouvelles se sont manifestées, au nom de l’universalisme maçonnique.

Elles ont rencontré chez les traditionnalistes une opposition où l’antisémitisme n’entrait pas, mais inflexible.

Il est trop tôt pour savoir si l’une ou l’autre des deux tendances l’emportera sur l’autre, ou si, à longue échéance, un clivage du Rite ne sera pas l’issue du débat, ajoutant un schisme de plus à la longue liste de ceux qui ont marqué son passé.

Le Rite, à l’étranger, est pratiqué en Suisse, dans les Etats scandinaves et en Allemagne. La Maçonnerie anglo-saxonne l’ignore. La Grande Loge de France et même le Grand Orient de France comptent, assez paradoxalement, quelques loges qui s’en réclament, mais dont les rituels ont été remaniés au point de rendre méconnaissable leur physionomie d’origine. 3

Historique

Jean Tourniac, dans « Principes et Problèmes Spirituels du Rite Ecossais Rectifié », a longuement évoqué la filiation templière, et même tout le canevas gnostique où tous les rapprochements sont établis entre l’Ordre du Temple et les Teutoniques, entre les Teutoniques et la Stricte Observance. Comme l’a noté et développé Ostabat, le R∴E∴R∴ a puisé principalement dans quatre courants Maçonniques:

* la Maçonnerie symbolique des trois premiers grades ; * les systèmes Ecossais au sens large du terme ; * l’Ordre des Chevaliers Maçons Elus-Coëns de l’Univers propagé par Dom Martines de Pasqually à partir de 1754, et qui eut une influence incontestable à l’élaboration du Régime ; * l’Ordre Germanique de la Stricte Observance, apporté d’Allemagne à Lyon en 1774 et qui fut le fondement même du R∴E∴R∴ On peut donc penser que le R∴E∴R∴ est un des Rites les plus anciens. René Guénon dit que la « Rectification » désigne « les modifications que subirent les Loges de la Stricte Observance, lorsque celles-ci cessa d’exister comme telle et fut remplacée par ce qui précisément s’appela le R∴E∴R∴, dans lequel Willermoz prit une part prépondérante».

Martines de Pasqually s’est énormément dépensé pour créer son Temple des Elus-Coëns, un système de Hauts Grades copié sur les trois premiers grades maçonniques. En 1766, il instruit Bacon de la Chevalerie qui ordonne Willermoz comme Réau-Croix en 1768. Saint-Martin a été initié à son tour en 1765. Pierre Fournier initié en 1768 subit les influences de Jacob Böhme, de William Law, de Mme Guyon, de Swedenborg, de Mesmer, a eu une forte influence après la mort de son maître en 1774.

Willermoz, épris de maçonnerie ésotérique, s’est mis en relation avec le Baron de Hund en 1772. Dans « L’Esotérisme au XVIIe siècle », les Templiers français ne se rattachent à la SOT que par un serment d’obédience prêté à Hund et à Ferdinand de Brunswick. En échange de ce serment, les Français ont reçu les rituels Allemands. En 1777-1778, Willermoz entreprend l’œuvre de sa vie. Avec Jean Braun, Paganucci, Jean-André Périsse-Duluc, Frédéric-Rodolphe Salzmann, Jean de Turckheim, il remanie tous les cahiers. Toutes ces élaborations, ces préparations, auxquelles il se livre avec ses amis, sont généralement dénommées « Réforme de Lyon ».La section Française de la SOT se trouve pratiquement libérée du contrôle allemand. Dès lors, le Système des C∴B∴C∴S∴ va se développer régulièrement.

Willermoz réunit les trois Directoires Templiers Français en un Convent, dit Convent des Gaules, qui se tient à Lyon en 1778. Il enregistre officiellement la naissance de cet Ordre qui comporte six grades : les trois bleus, celui de Maître Ecossais de Saint-André, et deux dits de l’Intérieur (Ecuyer Novice et Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte). Mais il en existe deux autres, très discrets, destinés aux plus doués des C∴B∴C∴S∴: les grades de Profès et Grand Profès. Même les titulaires des deux grades de l’intérieur ignorent leurs existences.

La Stricte Observance Templière L’Ordre Germanique de la Stricte Observance Templière (SOT), importé d’Allemagne, inscrit sa pensée dans le R∴E∴R∴ qui, au Congrès de Lyon (1774), voudrait faire prévaloir cette vision. Cependant le Congrès de Lyon de 1778 n’ose pas prendre de détermination trop radicale. Il n’émet pas de réponse affirmative sur la filiation temporelle des Templiers et des deux grades sacerdotaux de Profès et de Grand Profès. Mais on y adopte les rituels préparés par Willermoz qui paraissent sous les titres de Code Maçonnique des Loges Réunies et Rectifiées de France, de Code Général des Règlements des C∴B∴C∴S∴ et même, en reprenant des idées de Pasqually, on retient les Instructions Secrètes des Profès et Grands Profès. 4

Il faut revenir sur les Conférences des Elus-Coens de Lyon (1774-1776). Ce manuscrit capital, rédigé par Willermoz, a très certainement reçu les accords de Duroy d’Hauterive et de Saint-Martin « qui ont exercé une influence déterminante au cours de ces débats ».

Ces textes nous apporte une connaissance plus approfondie du Temple de Salomon, du Ternaire alchimique, de l’Axe Feu Central, des nombres et de l’Histoire philosophique du genre humain; ils constituent le carrefour, la plaque tournante où convergent aussi bien la doctrine, voire le testament spirituel de Martines de Pasqually. On y retrouve aussi bien le Martinisme de Louis-Claude de Saint-Martin que la Réforme Maçonnique de Lyon (grâce à la présence de Willermoz qui présida à la rédaction de cet écrit) qui allait transformer une partie du courant Germanique de la SOT en R∴E∴R∴.

Pour plus de détails, se reporter à l’important ouvrage de René Le Forestier, La Franc-Maçonnerie templière et occultiste aux XVIIIe et XIXe siècles.

L’esprit du Rite Ecossais Rectifié A toute époque, il y a eu tentative de connaissances matérielles s’intégrant dans une pensée religieuse, car dans la Nature tout est sacré, tout est Divin.

On peut penser que l’alchimiste Paracelse, qui est aussi un théosophe, fait entrer toute la nature dans sa foi religieuse; la Mystique Chrétienne se teinte d’une recherche scientifique que nous découvrons mieux encore avec les Manifestes de la Rose-Croix, ceux établis par Andreae ou par ses amis. Helvétius, Newton, Goethe associent la philosophie de la Nature à l’essor scientifique. Ces savants reflètent cette préoccupation constante qui en fait, est de tout temps, de chaque époque, car elle est au cœur même de l’homme.

Avec cette soif de connaissance on recherche une clef universelle, applicable à toutes les sciences; les mouvements spiritualistes sont fort nombreux et aspect du Sacré.

Dès son premier degré, la caractéristique générale du R∴E∴R∴ est celle d’une pensée fortement chrétienne. Le rituel d’initiation de 1778 fait prêter, sur l’Evangile de saint Jean, le Serment suivant par le récipiendaire : « Je serais fidèle à la Sainte Religion Chrétienne, à son Souverain et aux Lois de l’Etat « . Cette attache johanniste sera mise en valeur, même de nos jours.

Le caractère chrétien du R∴E∴R∴ a bien été mis en valeur par Robert Amadou (Dictionnaire Universel) et l’on a cherché à concilier cette position très chrétienne, provenant de la Chevalerie, avec la tolérance Maçonnique. C’est ainsi que d’après le Rituel de Wilhelmsbad, « L’Ordre est Chrétien; il est le point de ralliement de celles du Christ, et il conduit à la Foi en ce Divin Maître » A Zurich, on corrige légèrement cette pensée : « L’Ordre est chrétien; il doit l’être, et il ne peut admettre dans son sein que des chrétiens ou des hommes bien disposés à le devenir de bonne foi, à profiter des conseils fraternels par lesquels il peut les conduire à ce terme ».

Enfin voici la déclaration solennelle de 1970 : « Le Grand Chapitre du Grand Prieuré des Gaules dit à nouveau sa fidélité aux Traditions conjointes de l’Ordre Maçonnique et aux Principes propres au Rite Rectifié. Considère que ce dernier possède dans son patrimoine un appel à la Tradition Chrétienne et à l’exploration de son ésotérisme qu’expriment entre autres le texte des prières et la prestation de Serment sur l’Evangile de saint Jean. Déclare ces formes intangibles. Dit que tous ceux qui, libres et de bonnes mœurs, voudraient appartenir au Rite doivent s’y soumettre. Nécessaires, elles sont suffisantes à constater les engagements. Les justifications d’un autre ordre ayant trait à l’Etat Civil ou à l’apport confessionnel ne sauraient leur être substituées ».

On peut aussi noter une technique rituelle beaucoup plus développée que dans le R∴E∴A∴A∴ ; les rituels d’ouvertures et de fermetures des travaux sont répétés par trois fois entre le Vénérable et les deux Surveillants. 5

Au R∴E∴R∴ il n’existe pas d’interrogatoire sous le bandeau pour le profane qui désire entrer en Maçonnerie; cette sorte d’interrogatoire ne figure pas dans le Compagnonnage, mais le rôle du ou des parrains y est primordial. On s’en remet donc à l’appréciation de ce frère, un être qui a lui-même gravi les échelons et qui est parvenu à la maîtrise; on laisse sa responsabilité s’épanouir alors qu’avec l’interrogatoire sous le bandeau pratiqué au R∴E∴A∴A∴, c’est la Loge – et non plus un membre – qui est le garant de la venue d’un nouveau membre. Par contre, on peut affirmer qu’au R∴E∴A∴A∴, l’interrogatoire est la première épreuve ressentie le plus souvent douloureusement par le postulant qui doit passer par la porte basse et plier l’échine quelque soit son rang social.

Notons quelques petites différences entre les deux Rites soit:

* le Tableau du grade avec la colonne tronquée et la devise Adhuc stat ; * ou le Tableau triangulaire situé à l’Orient et portant la mention : Et tenebrae eam non coprehenderunt. Il y a des différences observées dans les voyages et on évoque le symbolisme du miroir que l’on voit apparaître au 2 e grade du R∴E∴R∴, ainsi que le symbolisme du triplement des lumières d’ordre au 3 e degré.

Le « christianisme transcendant » imaginé par Martines de Pasqually, fort apparent dans les divers degrés de l’Ordre des Elus-Coëns, est bien passé dans le R∴E∴R∴. Mais encore faut-il ajouter l’influence de la Stricte Observance; c’est ce qu’a cherché Willermoz, et cette combinaison des deux doctrines apparaît clairement dans sa lettre adressée à Charles de Hesse le 12 Octobre 1781. Mais cependant, « aucune pratique théurgique martinézienne » n’a été introduite dans le R∴E∴R∴.

Par contre les Instructions Secrètes de la Grande Profession sont nettement inspirées par la doctrine de la Réintégration, doctrine qui reste cependant en harmonie avec doctrine chrétienne.

Les Rituels du R∴E∴R∴ montrent leurs filiations certaines avec ceux de la Stricte Observance. Le lien du Régime avec les Ordres Chevaleresques, et plus particulièrement avec celui du Temple, paraît indiscutable.

C ‘est ce que dit le Préfet lorsqu’il exhorte le nouveau chevalier selon le Rituel de 1808 : « Le trophée d’armes qui est devant vous, vous indique que l’Ordre des C∴B∴C∴S∴ dérive de l’ancien Ordre Général de la Chevalerie, duquel dérive aussi d’autres Ordres qui furent à la fois religieux et militaires, et particulièrement celui du Temple, avec lequel le nôtre a le plus d’affinités ». Le thème général est celui de la destruction du premier Temple et de sa reconstruction et se référant à la tradition Templière, les croisés templiers portent l’épée d’une main et la truelle de l’autre. Cette juxtaposition prépare le niveau de C∴B∴C∴S∴.

Ce qu’on peut appeler la synthèse du Rite Rectifié n’a donc pas eu pour objectif de modifier de quelque manière que ce soit les Rites eux-mêmes, mais plutôt de les entourer de ce qu’on pourrait appeler, si le mot n’était péjoratif, de spéculations destinées à préparer le candidat et à la rendre apte à mieux comprendre ces Rites, ou à lui fournir des indications quand à la conduite de sa vie et de sa pensée, pour éviter toute discontinuité avec sa vie Maçonnique.

La recherche d’une efficacité véritable a donc conduit ceux qui – nolens volens – eurent la mission d’achever cette synthèse à des travaux divers, dont la portée leur échappa peut-être souvent, mais n’en apparaissent pas moins tous orientés vers cette fin: confrontations de Rituels Maçonniques, rédactions successives de textes patiemment repris, sans que les Rites soient altérés, échanges de points de vues entre les Frères avant de recourir aux Assemblées Générales de l’Ordre 6

Le Régime Ecossais Rectifié ORIGINES HISTORIQUES DU REGIME ECOSSAIS RECTIFIE Le Régime Écossais Rectifié a été organisé entre 1774 et 1782 par deux groupes de Maçons lyonnais et strasbourgeois, parmi lesquels on peut citer Jean et Bernard de TURKHEIM et Rodolphe SALTZMANN (Strasbourg) et surtout Jean-Baptiste WILLERMOZ (Lyon 173O-1824) qui en fut l’âme pensante. L’architecture du Régime fut son œuvre, et c’est lui qui mit en forme la doctrine que celui-ci véhicule. Du point de vue formel, le Régime Écossais Rectifié a trois origines du point de vue spirituel, il a deux sources ou inspirations.

Pour ce qui est de la structure et de la symbolique tant maçonnique que chevaleresque, les trois origines du Régime sont :

La Maçonnerie française de l’époque, avec sa prolifération de grades les plus divers (WILLERMOZ les connaissait tous et en avait pratiqué beaucoup) et qui épurée, devait être structurée vers 1786-1787 en un Système qui portera plus tard le nom de « Rite français », avec ses trois grades et ses quatre ordres :

Sans omettre les divers grades dont la combinaison constitue ce qu’on appelle  » l’Ecossisme  » ont été également synthétisés par Jean-Baptiste WILLERMOZ.

Le Système propre à MARTINEZ de PASQUALLY personnage énigmatique mais inspiré, que WILLERMOZ, comme Louis-Claude de SAINT-MARTIN, reconnut toujours pour son Maître, c’est-àdire « l’Ordre des Chevaliers Maçons Elus Coëns de l’Univers ».

La Stricte Observance, dite encore « Maçonnerie rectifiée » ou « réformée de Dresde », Système allemand où l’aspect chevaleresque primait absolument sur l’aspect maçonnique, car il se voulait non seulement l’héritier, mais le restaurateur de l’ancien Ordre du Temple aboli en 1312.

Les deux sources spirituelles :

La doctrine ésotérique » de Martinez de Pasqually dont l’essentiel porte sur l’origine première, la condition actuelle et la destination ultime de l’homme et de l’univers.

La Tradition chrétienne indivise, nourrie des enseignements des pères de l’Église. Quoique certains aient affirmé, ces deux doctrines, non seulement ne se contredisent pas. Mais au contraire se corroborent l’une l’autre. Tous les textes prouvent la parfaite orthodoxie, au regard de l’ensemble des confessions chrétiennes, du Régime Rectifié, qui s’occupe, non de ce qui divise les chrétiens. mais de ce qui les réunit.

Partant de là, WILLERMOZ a donné à son Système ou Régime une architecture concentrique en l’organisant en trois  » classes  » successives de plus en plus intérieures et en même temps de plus en plus secrètes, chaque classe étant inconnue de celle qui lui était extérieure En outre, il a doublé le parcours initiatique de grade en grade par un enseignement doctrinal progressivement de plus en plus précis et explicite, au moyen  » d’instructions  » qui font partie intégrante du rituel de chaque grade.

Cette conception d’ensemble, architecture du Régime et doctrine, a été officiellement approuvée en deux étapes. D’abord sur le plan national, par le Convent des Gaules, à Lyon (novembre décembre 1778) lequel ratifia, entre autres, le Code maçonnique des Loges réunies et rectifiées et le code de l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, qui demeurent les textes constitutionnels, toujours en vigueur, du Régime.

Puis sur le plan européen, par le Convent de Wilhelmsbad en AIlemagne (août septembre 1782), tenu sous la présidence du duc Ferdinand de Brunswick-Lunebourg et du prince Charles de Hesse, principaux dirigeants de la Stricte Observance, qui se rallièrent à ce qu’on appelait à l’époque la  » Réforme de Lyon « . 7

Dans sa structure d’origine, le Régime Écossais Rectifié comportait trois classes, deux ostensibles et une  » secrète  » :

1-La classe symbolique ou Ordre maçonnique, dans laquelle est conférée et conduite à son terme l’initiation maçonnique.

Les trois grades pratiqués dans les Loges de Saint-Jean, dites Loges bleues à cause de la couleur de leurs décors. Le grade de Maître Écossais de Saint-André pratiqué dans les Loges de Saint-André ou Loges Écossaises, dites Loges vertes pour les mêmes raisons.

Sans ce quatrième grade, l’initiation maçonnique demeure incomplète. La cérémonie de réception à ce grade récapitule et parachève le contenu initiatique et doctrinal des trois précédents, et le mène à son accomplissement, il est donné au Maître Écossais de Saint-André de contempler tout ce qui l’attend jusqu’à sa réintégration dans la Jérusalem Céleste, but de l’initiation chrétienne. Ces quatre grades sont axés sur la reconstruction intérieure de l’homme par l’approfondissement de la Foi et la pratique assidue des vertus chrétiennes.

Lorsque le Maître Écossais de Saint-André a atteint le degré requis de réalisation spirituelle prouvant qu’il a effectivement mis en œuvre l’initiation maçonnique, il peut avoir accès à l’Ordre intérieur.

2- L’Ordre intérieur est un Ordre de chevalerie chrétien qui n’est en aucune façon assimilable ni à un système de hauts grades, ni à des grades philosophiques.

Il comporte deux étapes :

* Une étape préparatoire et transitoire : I’ Ecuyer novice. La qualité d’Ecuyer novice est conférée par la cérémonie de la « vestition ». Cette qualité est cependant révocable. En effet. L’Ecuyer novice a pour unique tâche de se préparer, durant un an au moins, à devenir Chevalier, mais s’il s’y révèle définitivement inapte, il peut, et même, selon la prescription du code des C∴B∴C∴S∴, il doit être rétrogradé et redevenir Maître Écossais de Saint-André.

* La seconde étape est celle de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte (en abrégé C∴B∴C∴S∴). Ce n’est pas un grade, mais une qualité que confère la cérémonie d’armement. Celle-ci est en principe célébrée par le Grand Maître National et Grand Prieur en personne ou, à défaut, par un délégué nommé par lui (le Chevalier a le devoir d’œuvrer activement dans l’Ordre et dans le monde pour mettre en pratique les enseignements moraux, religieux et doctrinaux reçus dans les Loges de Saint-Jean et de Saint-André, qu’il n’abandonne pas pour autant mais où il doit, au contraire, et plus que jamais, se vouer au service de ses frères et de tous les hommes, en particulier par l’exercice de la bienfaisance.

3 – La Profession Au XVIIIème siècle, existait en outre une « classe secrète », celle de la Profession. Les Chevaliers qui la composaient se répartissaient en deux catégories : les Profès et les Grands Profès, réunis en un Collège métropolitain. Tenus à un engagement total envers l’Ordre, sans exercer en tant que tels des fonctions de responsabilité ou de direction administratives, ces dernières incombant aux dignitaires de l’Ordre intérieur, Profés et les Grands Profès se vouaient à l’approfondissement, par l’étude et la méditation, de la doctrine posée dans les textes (instructions secrètes) conservées par le Collège métropolitain, à charge pour eux de vivifier l’Ordre à la fois par leurs connaissances et leur exemple de vie. Cette classe a apparemment disparu ou, si elle existe encore, poursuit, comme d’ailleurs à l’origine, une existence très discrète.

Selon les décisions prises au Convent des Gaules et confirmées au Convent de Wilhelmsbad, le Régime Ecossais Rectifié se démarquant ainsi de la Stricte Observance avait renoncé à une filiation historique avec l’Ordre du Temple, tout en conservant avec lui une filiation spirituelle, illustrée par l’adoption, au même Convent, de la dénomination « Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte », de 8

façon à faire référence aux « pauvres chevaliers du Christ » des origines , et non à l’Ordre riche et puissant que leurs successeurs étaient devenus dans la suite des temps.

De par sa filiation spirituelle, le Régime Écossais Rectifié revendique, tout comme l’Ordre du Temple, la double qualité chevaleresque et religieuse. Cette double qualité, qui apparaît déjà en filigrane dans les grades maçonniques et est conférée en plénitude par l’armement, est à mettre en œuvre dans un monde qui n’est plus ni celui du XIIème siècle, ni celui du XVIIIème siècle, mais pourtant par des moyens dont la nature essentielle reste immuable puisqu’ils consistent en la mise en pratique quotidienne et universelle des vertus théologales de foi, d’espérance et de charité. Cela s’exprime dans les devoirs posés, non seulement au C∴B∴C∴S∴, mais aussi au Maçon rectifié, dès le grade d’apprenti, de la défense de la sainte religion chrétienne et de l’exercice de la bienfaisance envers tous et particulièrement envers les plus faibles et les plus démunis.

LES STRUCTURES HIERARCHIQUES ET ADMINISTRATIVES DU REGIME Lors de sa constitution, le Régime avait repris, moyennant adaptations décidées au Convent des Gaules, puis au Convent de Wilhelmsbad, la division administrative que la Stricte Observance avait instituée d’après celle de l’ancien Ordre du Temple. Selon cette division, le territoire français était en trois Provinces :

o La IIème Province, d’Auvergne, avec pour chef-lieu Lyon o La IIIème Province, d’Occitanie, chef-lieu Bordeaux o la Vème Province, de Bourgogne, chef-lieu Strasbourg.

Lors de sa reconstitution en 1935, le Grand Prieuré des Gaules se considéra, ainsi qu’il a été dit plus haut, comme le successeur de la Province d’Auvergne dont il reprit les armes et la devise.

Il est également détenteur des droits de la Province d’Occitanie. Quant à la Vème Province dite de Bourgogne dont le siège, primitivement sis à Strasbourg et qui fut plus tard transféré à Besançon, elle englobait une partie la Suisse, et Genève devint d’abord un sous-Prieuré de cette Province avant de prendre son autonomie servant le titre de Vème province avec sa devise :

« MORS OMNIA AEQUAT »« LA MORT EGALISE TOUTES LES DISTINCTIONS.» «QUI CUPIT » – « QUI VOUDRA » «PROSPERO MOTU » – « AVEC LA DILIGENCE & L’ETUDE, ON VIENT A BOUT DE TOUT »

Au XVIIIème siècle, de façon à éviter toute confusion entre la classe symbolique ou Ordre maçonnique et l’Ordre chevaleresque, coexistait une double hiérarchie dirigée par les mêmes dignitaires, mais sous des appellations différentes. Cette distinction fondamentale subsiste toujours.

Le Régime Ecossais Rectifié a pour but de maintenir et de fortifier, non seulement dans l’ordre Intérieur, mais aussi dans les Loges maçonniques, les principes qui sont à sa base :

1. La fidélité à la religion chrétienne fondée sur la foi en la Sainte la Sainte Trinité.

2. L’attachement aux principes et traditions, tant maçonniques que chevaleresques du Régime se traduisant par l’approfondissement de la foi chrétienne et l’étude de la doctrine ésotérique chrétienne, enseignée dans l’ordre.

3. Le perfectionnement de soi-même par la pratique des vertus chrétiennes afin de vaincre ses passions, corriger ses défauts et progresser dans la voie de la réalisation spirituelle.

4. Le dévouement à la patrie et le service d’autrui.

5. La pratique constante d’une bienfaisance active et éclairée envers tous les hommes, quelques soient leurs races, leurs nationalités, leurs situations, leurs religions et leurs opinions politiques ou philosophiques. 9

NOTES COMPLEMENTAIRES

CHRISTIQUE adj. XX e siècle. Dérivé de Christ. Rare. Qui a rapport au Christ. La parole christique.

CHRÉTIEN, -IENNE (ch se prononce k) adj. IX e siècle. Du latin chrétien christianus, « chrétien », dérivé de Christus (voir Christ).

1. Qui est baptisé et fait profession de la foi en Jésus-Christ.

2. Relatif à Jésus-Christ et à l’Église qu’il a fondée. La religion, la foi chrétienne. La morale chrétienne. Mener une vie chrétienne. L’humilité, la charité chrétienne. Les Frères de la doctrine chrétienne ou Frères des écoles chrétiennes, religieux voués à l’enseignement. L’ère chrétienne, celle qui commence à la naissance de Jésus-Christ.

3. Qui est imprégné de christianisme. Les traditions chrétiennes. La civilisation chrétienne. L’art chrétien. La philosophie chrétienne.

Adhuc Stat est le plus formidable emblème du Régime. Si on le trouve tout particulièrement au premier grade, il demeure omniprésent, en trame de fond, pour l’ensemble des grades. Cette colonne brisée demeure un emblème de l’homme dégradé, de celui que se trouve incarné dans ces imperfections humaine et charnelle liées à la chute « adamique » mais à qui se trouvent offerts, cependant, les moyens de sa régénération en vue du recouvrement de cette perfection première qui fut l’apanage du premier Etre, du premier Adam.

Il est la « signature » du caractère gnostique du rite écossais rectifié. Il l’est dans tous ses grades au contraire d’autres formes maçonniques qui ne le sont jamais même s’il leur arrive d’évoquer la gnose au hasard des rituels et des degrés. Ce qui demeure fondamentalement plus important que le seul caractère « templier » privilégié par certains.

La patristique grecque, comme les Anciens Maîtres des grandes traditions initiatiques, prévenaient, parfois, que si l’on avait à choisir entre la Gnose et la Connaissance, il fallait privilégier la Gnose ! Noter à ce propos que dans l’univers initiatique et spirituel, il s’agit de deux univers radicalement différents l’un de l’autre ; il n’y a que les non initiés ou les « ignorants » qui retiendront gnose = connaissance, qui n’est rien d’autre qu’une donnée intellectuelle ou la traduction d’un mot étranger par un mot français mais n’a rien à voir en fait avec ce que chacun des deux recouvre dans l’univers de la sacralité ou de l’initiation.

Le « gnostique » est un « libéré vivant », quoiqu’il fasse en ce monde, ce qui ne sera jamais le cas pour les Initiés ayant reçu la Connaissance.

Voilà pourquoi, Willermoz et ses fidèles Grands Profès (niveau secret très supérieur à celui de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte par les connaissances qu’il impliquait) se livreront à des pratiques occultes et magiques afin de savoir, par l’entremise de la Chose puis de l’Agent, quelle était leur situation spirituelle à cet égard et quel sort leur était réservé (réintégration ou non).

1717 – 24 juin : Fondation d la G∴L∴ de Londres 1723 : Publication des premières Constitutions d’Anderson 1726 : à Paris, les Loges « Jacobites » 1737 : le discours de Ramsay 1738 : Publication des secondes Constitutions d’Anderson 1774 : apport d’Allemagne à Lyon de l’Ordre Germanique de la Stricte Observance Templière, qui fut le fondement même du R∴E∴R∴. 10

1778

: Convent des Gaules à Lyon – (J-B Willermoz) : Convent de Wilhelmstad 15/07 – 1/09 création du R∴E∴R∴ : suspension des travaux, Roëttiers de Montaleau fonde la L∴ « le centre des Amis » : « le centre des Amis n° 1» adopte le rite Ecossais Rectifié, : disparition en France du R∴E∴R∴ : le G∴O∴d∴F∴ supprime l’obligation de croire A∴L∴G∴D∴G∴A∴D∴L’U∴ : réveil du R∴E∴R∴ par Edouard de RIBAUCOURT au « centre des Amis » G∴O∴d∴F∴ 1913 : séparation du centre des Amis du G∴O∴d∴F∴ et création de la G∴L∴N∴I∴R∴ (Grande loge nationale indépendante et régulière pour la France et les colonies).

BIBLIOGRAPHIE:

• * Le symbolisme maçonnique traditionnel, 2ème édition, par Jean-Pierre Bayard, éd. Edimaf, Paris, 1981

• * L’ésotérisme au XVIIIe siècle, par Antoine Faivre, éd. Seghers, Paris, 1973

• * « Les origines du régime rectifié », par M. Ostabat, revue Le symbolisme, septembre 1968, numéros 385-386, p.309

• * « Le RER et les répétitions rituelles », par J. Tourniac et P. Le Sellier, revue Le symbolisme, janvier-mars 1966, numéro 373.